Voyage au bout de l’ennui

Posted on 5 octobre 2010

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La confrontation entre Sunderland et Manchester United fut l’exemple même du match à rebonds. Pas de rebondissements, seulement des rebonds, des grands rebonds, et puis des duels, aériens forcément, des centres, des têtes, encore des rebonds et quelques frappes, deux ou trois pas plus. Jouer au sol ? A quoi bon ? Construire ? Trop compliqué. Alors on balance. Advienne que pourra. Le jeu à l’anglaise ? Son mauvais côté hélas. Résultat : un bon O-O à l’ancienne. La Premier League offre généralement au moins un match pourri par journée. Pas de pot. Canal+ sport avait choisi de diffuser ce match-là. Pas de pot, c’est celui qu’on s’est tapé.

Avec un peu plus d’audace, les joueurs de Sunderland – surnommés les Black Cats – auraient pu se payer le scalp de la bande à Paul Scholes et l’exhiber devant leur public du Stadium of Light. Les Red Devils, amorphes comme jamais, peuvent s’estimer heureux d’empocher le point du nul. La nullité de leur prestation n’en valait pas tant, vraiment. Face à cette valeureuse équipe de Sunderland, les hommes de Sir Alex Ferguson méritaient de perdre. Mais ils furent sauvés par la maladresse de leurs hôtes du jour. Disposés en un 4-5-1 censé contenir les diableries adverses, les locaux se sont montrés exemplaires, eux, dans l’envie, la combativité et la solidarité. Problème : le talent ne s’invente pas. Lancé plein axe par Cattermole au quart d’heure de jeu, le Français Steed Malbranque se présenta seul face à Van der Sar mais perdit son duel.  Voilà pour le plus joli mouvement de l’après-midi : trois passes de suites vers l’avant. Des passes, Zenden n’en aurait même pas eu besoin pour scorer si sa frappe du gauche des 20 mètres, consécutive à un cafouillage, ne s’était fracassée sur le montant droit du goal mancunien. Malbranque et ses potes auraient dû mener 1-0 à la mi-temps. Dommage. Il n’y aura plus d’occasions pour eux dans le deuxième acte, si ce n’est cette frappe de Bent, à la réception d’un centre du latéral gauche Bardsley, qui passa de peu à côté.

Sir Alex Ferguson..

Et Man U alors ? Ils ont bien dû vendanger un but tout fait. Et ben non. Pas une seule occasion franche. Bon c’est vrai, on a oublié de se réveiller à l’entame du deuxième acte. Mais un rapide coup d’oeil à la mine – déconfite – du comparse parieur – le bougre avait misé sur une victoire de United – d’à-côté acheva de nous désoler. Rien, même pas l’ombre d’un danger. Il y eut bien cette frappe flottante de Nani des 30 mètres, la première cadrée de United…à la 77e minute. Mais Mignolet, le gardien des locaux repoussa des deux poings. Tentative trop audacieuse pour être crédible. Le plus frileux supporter des Black Cats n’eut même pas peur, c’est dire. Et ce ne sont pas les entrées en jeu de Berbatov (45e), de J. Hernandez (65e) et de Bebe (80e) qui y changèrent grand chose.  Comment une équipe qui gagne à Valence en milieu de semaine ( un hold-up certes) peut-elle offrir un spectacle si affligeant le samedi venu ? Il y a bien une explication à cette prestation insipide. Sir Alex Ferguson avait fait tourner son effectif. Outre la blessure de Valencia, et celle plus ou moins avérée de Rooney, le coach écossais avait décidé de laisser Carrick et Park Ji-Sung au repos et de faire souffler Evra et Berbatov. Résultat : une compo aussi insolite que bancale, surtout en pointe, où Macheda et Owen avaient pour mission de conduire l’attaque mancunienne. Une mission à laquelle ils faillirent bien comme il faut. Les deux attaquants n’ont strictement rien fait. Sur les rares ballons qu’il toucha, le jeune italien la joua trop facile. Son collègue du jour, le ballon d’or 2001, a quant à lui beaucoup couru, dans le vide, confirmant qu’il avait bien perdu de sa superbe. Symptôme de leur non match : aucun des deux n’a frappé au but. Positionné en milieu droit, Nani, dont on espérait qu’il éclaire le jeu, n’a rien apporté non plus. Derrière, les milieux défensifs Scholes et Fletcher ont traversé le match au petit trot. La charnière centrale a assuré le service minimum, alors que les latéraux Rafael – qui n’a pas vraiment l’air d’un sage – et O’Shea – on se demande encore ce qu’il fout arrière gauche – ont oublié de monter. Les Mancuniens se sont contentés de balancer de longs ballons, défendant patiemment dans leur camp le bon vieux 0-0. Dans cette absence de jeu ambiante, ils furent clairement dominés par les locaux. Monopolisant le ballon – un comble – ces derniers ont même essayé de construire. Mais cette construction s’est bornée à décaler les deux ailiers – à charge pour eux de centrer dans la boîte – quand elle ne s’est pas heurtée à la défense des Reds Devils. Quels enseignements tirer d’une telle après-midi ? Le banc de United n’est pas aussi profond qu’il n’y paraît, Zenden joue toujours au football  et les hommes de Steve Bruce réussissent bien face aux grosses écuries du championnat. Après avoir rossé City et partagé les points avec Arsenal et Liverpool, mettre en échec le vice-champion en titre est une preuve de solidité. Les Black Cats peuvent toutefois s’en vouloir de ne pas y avoir assez cru, tant la porte du succès leur était grande ouverte. Pourquoi leur coach n’a t-il pas fait entrer Gyan plus tôt qu’à la 85ème minute ? Sûrement la peur de perdre. Après tout,  un tiens vaut mieux que deux tu l’auras.  N’empêche, à trop vouloir rester en place, on en oublie qu’il y avait la place.  Hein Steve ? 94ème minute, l’arbitre met fin au calvaire. D’un geste de la main évocateur, Sir Alex Ferguson manifeste à son équipe qu’il n’a pas goûté sa prestation. Le fameux clou du spectacle.

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